Béatrice Libert, Au seuil de l’ange, poèmes, éd. Vagamundo, préface de Lionel Ray.
Un recueil très charpenté, marqué par une belle unité, un ton plus assuré, peut-être, que celui des recueils précédents. Chaque poème a pris pour assise, pour fondation, un, ou deux vers d’Yves Namur. C’est à la page 43 que le sens profond nous est révélé: l’amour est métamorphose:
Peut-être ne suis-je/Que l’apparence de moi-même?//Peut-être ai-je abandonné mon âme/Dans un divan un parc une gare?//Peut-être l’ai-je laissée à côté d’une rose/Ou bien sous le duvet d’une mésange triste?//L’ai-je donnée en gage/A l’ange de passage qui souriait//Et de sa main effaçait/Les affres de l’hiver aux vitres des maisons?//Peut-être la retrouverai-je/Dans le sommeil de la pluie//Lorsque le vent lèche les ombres/Les arbres qui frissonnent//Et les poèmes qu’on abandonne?
Le distique paraît spécialement bien adapté pour de telles strophes, où l’on croirait, parfois, assister à la rencontre de Louise Labé et de Rainer-Maria Rilke, dont l’ange et la rose emblématiques ne sont jamais bien loin. Le vers d’Yves Namur, en début de poème, est là disposé un peu comme un greffon.
Une philosophie, une sagesse quasi mystiques. Un long cri d’amour. Le Cantique des cantiques en action, explorant l’entièreté de son domaine, et, comme un oiseau, chantant sur les plus hautes branches. Chaque poème, cœur battant, vit comme un être vivant et vibrant, se fraye un chemin vers un nouveau sommet. Et le poème de la p.99, clair et obscur à la fois, est là, presque, comme le signe d’un miracle:
Une étoile est là//En nous comme/Au-delà de nous//Mon chant la rejoint/Lorsque tu me touches//Et me fait briller/Dans ta clarté.
Joseph Bodson