Iocasta Huppen, « Oh, et puis zut ! », éditons Bleu d’encre, 2020
Un recueil vivifiant à mettre entre toutes les mains pour égayer cette fin d’année. Déjà le titre, mais aussi la couverture intriguent, font sourire : morceaux de chocolat ou petits trésors que l’on enfouit dans ses poches au cours de promenades ou encore, « Caillou sur le chemin/du bout de la chaussure/l’envoyer au soleil ».
Que l’on ne s’y trompe pas (le 4è de couverture l’explique), ces poèmes ne sont pas des haïkus bien qu’ils en aient la forme, mais des senryu (nom d’origine japonaise désignant des poèmes d’humour traitant en particulier des petites faiblesses humaines).
Des thèmes les plus divers sont abordés, au fil des saisons et répondant à l’humeur du moment de l’auteure. Auto-dérision : « Dix jours à la mer/sans shampoing/la voilà, la Gorgone » ; des images parlantes, où tout est dit en quelques mots : « Craquements de biscottes -/dans les idées du matin/mettre de l’ordre » ou « 40 °C-/mon voisin d’ombre/ronfle sous les chênes » ; ironie douce-amère de circonstance : « Jours de confinement- notre terrasse vaut de l’or » ; « Départ imminent/crème solaire, maillot de bain/et masque en tissu ».
Iocasta Huppen nous offre un regard tendre ou amusé sur le quotidien, nous faisant parfois rire de nous-même. Il semble qu’elle observe les êtres et toutes choses qui l’entourent de façon à les capter dans ses mots. Quoique … comme le dit le poète suisse Philippe Jaccottet, (« le brillant de la lumière sur l’herbe et sur les arbres, on ne peut les goûter tranquillement…sans que le poète se lève dans votre tête comme un greffier et note ! »,) le poète doit parfois délaisser sa plume…
« Ciel bleu azur-/oh, et puis zut ! / je referme mon carnet ».
Le recueil se clôt sur un poème grand ouvert sur le rêve et l’imaginaire et sans doute aussi, sur un prochain recueil de Iocasta…
« Approchez-vous/qu’est-ce que vous voyez/par cette fenêtre sur la mer ? »
Martine Rouhart