Nelly Laurent, Petites histoires à raconter à soi-même, éd. Traces de Vie, ill. Agnès Laurent, 2024, 64 pp., 13 €.

Un recueil de contes, de nouvelles, de scènes de vie, où dominent l’émotion, la tendresse, la drôlerie…sur un fond plus grave d’enfance solitaire, suite à la mort prématurée de père, et au souvenir de nombreux parents, tués lors de l’avance allemande en Gaume en 1914, à Ethe notamment.
De la tendresse, beaucoup, notamment dans ces histoires d’ours, qui renferment une énigme pour l’une, un sauvetage pour l’autre. L’ours, l’animal le plus proche de l’homme dans nos régions, qui fut la source de bien des fables et des racontages, et qui accompagna l’enfance de bien des gens…Une figure tutélaire.
Malgré toutes les épreuves, et en rappelant au passage les lieux de sa vie, la Gaume, la mer, l’Ardenne, et l’histoire de sa famille, ce qui domine, et qui ressurgit toujours, chez Nelly Laurent, ici, comme dans ses précédents livres, c’est la volonté de survivre, d’échapper aux épreuves, pour transmettre, de génération en génération, une droiture, une joie de vivre. Joie faite de petites choses, auxquelles il convient seulement de prêter un rien d’attention, au fil du temps qui passe :
« La joie trouve son ampleur, dessine des arabesques. Fou rire de gosse qui surprend par hasard un autre soi, différent et intime. Deux cailloux qu’éclabousse un filet d’eau sur une mousse…
Descendre en cave-photo, allumer les lanternes, la lampe rouge puis la jaune, doser les produits de développement à bonne température. Préparer le chrono, les pinces, le margeur. Autant de rites pour créer l’alchimie. Et jouer. Jouer au magicien. D’une enveloppe noire, extraire le sensible. »
Un ruisseau qui court, une vieille photo que l’on retrouve : traces de vie, traces d’enfance…La joie est un jeu, et nous oublions trop souvent cette part d’enfance qui repose en nous.
Et, dans les Histoires de jardin, à propos du merle noir :
« Un long papier froissé se déroule à l’embout d’un sifflet orangé, un colimaçon de dix notes, à souffler juste au-dessus de la portée musicale dont le thème inspira un concert à Beethoven. »
Bref, un petit livre qui renvoie à merveille l’écho du titre de la collection, Traces de vie.
Et vous, y allez-vous souvent, dans vos souvenirs d’enfant ?

Joseph Bodson