Anne-Sophie Vanderbeck, Un mètre soixante-huit de chair rose, Académia, 216 pages, 19,50 euros
Le recueil ne compte pas moins de 25 textes, de longueur, de style et de genre très variés, sans véritable lien entre eux.
Il s’agit d’une suite de petits récits un rien disparates, un peu inégaux, comme si l’auteure avait voulu rassembler et jeter pêle-mêle des souvenirs d’enfance, des émotions, des impressions, des petites histoires qui lui reviennent ou lui sont un jours passées par la tête grâce à une imagination foisonnante.
Des récits au ton parfois triste, parfois gai, nimbé souvent d’ironie, parfois aussi d’un brin de tendresse, notamment dans le très court texte « Le vieux monsieur qui avait froid » . Des personnages souvent décalés, des situations originales, voire tout à fait oniriques. Il y est question de déménagement dans une péniche, d’une « rumeur dans une rue qui se meurt », d’un accordeur de piano des rues, d’une salade qui « cherche vinaigrette sans cornichons », etc…
L’écriture est assez déroutante. Beaucoup de passages au style familier, au langage parlé (« Une liberté qu’on vous fourgue de force »(..) »La suite , elle veut pas savoir. Elle se roule dans sa couette, crêpe à la cassonade(…) « Parfois, la vie c’est comme un film dont on aurait un peu poussé le scénario, c’est tellement gros que ça semble pas crédible »), avec quelquefois des mélanges de temps (présent et passé simple) un peu curieux, comme dans le texte « Le piano d’Eugène ».
Mais ces passages alternent avec d’autres, plus littéraires et même poétiques, qui retiennent l’attention.
Par exemple à la page 57 : »la maison pleure un peu de ses gouttières, ça lui fait des traînées grises sur ses joues en ciment, ses deux fenêtres aux petits carreaux roses, comme des yeux fatigués ». A la page 91: « Une vieille rue sans gloire, enfoncée au cœur de la ville, petite veine oubliée de l’artère principale, surplombée par une forêt d’immeubles et de quelques grues qui grincent en cadence du lundi au vendredi ». Ou encore, page 119 : « En sortant, le matin lui sembla plus lumineux, un oiseau de février chanta un air de printemps, elle sauta sur son engin et se mit à tanguer sur les vagues de circulation, comme chaque jour ».
Martine Rouhart