Tranches de vie dans un quartier
Evelyne Wilwerth, N’oublions jamais les caresses, Bruxelles, M.E.O., 2017, 110 p. (14 €)
Il semble que la forme du roman choral convienne bien à Evelyne Wilwerth. Elle lui permet de faire intervenir plusieurs personnages autour d’un lieu. En l’occurrence, une placette urbaine et ses habitants. Êtres vivants ou objets inanimés ont dès lors l’occasion de prendre la parole pour exprimer ce qu’ils ressentent, décrire ce qu’ils observent.
Ainsi, de chapitre en chapitre (très courts, ils dépassent rarement 2 pages et sont précédés d’une sorte de prologue attribué à un narrateur témoin indiquant quelques données essentielles à la compréhension immédiate du récit), s’assemble l’image d’un quartier, l’évolution de l’existence de certains de ses citoyens.
L’échantillonnage est varié. Voici une artiste amoureuse de Nicolas de Stael. Un séducteur ventripotent en déficit de drague. Une jeune dame s’occupant d’un père à la mémoire abolie. Un enfant de parents divorcés en mal de bêtises. Une femme venue pour un colloque et son amant. Puis un chien noir et une plante abandonnée.
Tous y vont de leur soliloque ou de leur dialogue. Ils expriment des solitudes, des existences en quête d’autre chose que leur immobilisme au sein d’un quotidien de routine. Autour, c’est l’atmosphère de la cité : circulation automobile, individus fugaces dans les rues, météo passant d’un temps à un autre, bruits et odeurs. En chacun, c’est le vide d’un acte non accompli, d’un geste esquissé mais jamais terminé, d’une envie ratée de contact avec tous ses manques de tendresse accumulés.
Michel Voiturier