Jean Joubert, Longtemps j’ai courtisé la nuit, poèmes, éd. Bruno Doucey, Cour d’Alsace-Lorraine,67, rue de Reuilly, F-75012 Paris. www.editions-brunodoucey.com.
Jean Joubert est décédé en 2015. Voici assemblés les poèmes qu’il écrivait au jour le jour, et qui sont d’une grande beauté, même si l’inspiration en est très variée. On y trouve en effet des poèmes pour enfants, rassemblés pour la majeure partie par Béatrice Libert; d’autres, très marqués par la violence et le fanatisme dans lesquels nous vivons, bon gré mal gré. Enfin, en première partie, des textes d’une inspiration plus personnelle, intimiste même. Il s’inspirera ainsi, p.9, d’un caillou ramassé sur la plage de Maguelone. Une poésie à la fois simple et savante, avec des images somptueuses: J’errais à l’ombre ma mort, p.17. Toute la scène est pleine d’une sensualité vivace et fraîche.
Une sorte de paganisme panthéiste, comme si lui-même en était partie intégrante. Un peu comparable à celui de Joë Bousquet, cet autre grand nocturne, à certains moments de grâce où tout brusquement s’arrête, dans une sorte de recueillement, de transfiguration. Chez Francis Jammes même, rarement il est vrai, l’on trouve ces moments de grâce où l’innocence s’allie à l’expérience.
A la page 31, une belle scène de nature, où l’on croit voir ruisseler le Printemps de Botticelli, dans un grand souffle de vent frais qui agite les feuillages. Et puis, p.63, devant ce quai désert, un sentiment de vide, d’inquiétude, d’attente
Mais l’humain va prendre une plus grande place, et ce sera une poésie du désenchantement, et le mystère se fera apologue. Puis, à la p.100, c’est son père qui lui apparaîtra sous la forme d’un cavalier bleu. Le cerf, la rose, auront leur tour en ce jeu de symboles.
Avec l’âge est venu le temps du retrait et du refus./Dans la grâce de ce jardin/voici pour la seule pensée/la musique silencieuse des mots.
Sans conteste, nous avons en Jean Joubert, amant de la nuit, l’un de ces grands témoins du silence, qui, de loin, nous montrent le chemin.
Joseph Bodson