Eric Dejaeger Ni dieu, ni maître, ni réseau social aphorismes «éditions Cactus Inébranlable (72 pages, 12 euros, 2024)
On reconnaît bien, à nouveau, Eric à son enthousiasme à évoquer la poésie à sa façon : « Pour respirer mieux, liquidez quelques powètes qui pompent l’air ». On sait, bien sûr, qu’il ne met pas tous les poètes dans le même sac. Il fut un des premiers à en faire la promotion autrefois dans sa revue « Ecrits vains ».
De manière plus générale, il s’active toujours aussi bien à dénoncer l’époque : « Grâce aux réseaux dits sociaux, les lâches peuvent se lâcher » ou encore « L’histoire est trop souvent en marche au pas de l’oie ou cadencé ». Il n’a pas tout faux même si c’est parfois dit /écrit d’une façon abrupte : « Envie de vous suicider ? Pendez votre psychiatre, ça vous soulagera », l’humour permettant, à son niveau, sans doute presque tout.
Parfois il se révèle lui-même pour qui le connaît : « Avoir tout pour déplaire » dit-il de lui-même mais n’est-ce pas, finalement, une autre façon de se rendre sympathique ?
Même s’il enfonce quelques-uns de ses clous assez rouillés, Eric se renouvelle de temps à autre : « Trouvez- moi une raison valable pour arrêter d’écrire ? » interpellant ainsi, régulièrement, son lecteur.
Féru de jeux de mots (« Ne perdez jamais la main si vous n’avez pas pied ») il peut être à la fois de bon conseil, d’une fausse mauvaise foi tranquille ou blagueur : « Les hommes préhistoriques alcooliques voyaient des mammouths roses ».
Bref, rire ça détend et si cela ne plaît pas ce n’est pas non plus trop long à lire ( ou à rire ?) : « J’ai toujours quelque chose à ne pas dire » nous dit Eric. En effet, et c’est sans doute pour cette raison qu’il écrit : « Je hais les armes. Hormis l’humour. Encore faut-il être lu ».
L’aphorisme est un genre qui plaît et les éditions Cactus Inébranlable en ont fait leur cheval de bataille tandis que l’éditeur ne sera peut-être pas tout à fait d’accord avec celui-ci : « Il y a de plus en plus d’auteurs d’aphorismes. Donc de moins en moins de talent ». C’est sans doute faux tandis qu’ Eric croit, lui, plutôt en la reconnaissance posthume (rires) : « Ta gloire littéraire posthume intéresse tes ayants droit ». Illustration et mise en images de Jean-Paul Verstraeten traduisent assez bien la mentalité du livret.
Patrick Devaux