Patrick Henin, « En avant, marge ! » , Cactus inébranlable, coll. Les p’tits cactus n° 74, 2021, 81pp., 10€
La maison Cactus inébranlable n’en est certes pas à l’édition de son premier recueil d’aphorismes. On parlerait de spécialité si son catalogue ne s’ouvrait également à d’autres territoires. Avec le « En avant, marge ! » de Patrick Henin, la collection Les p’tits cactus s’enrichit d’un ouvrage supplémentaire.
Une première lecture, consciencieuse et en séquence, laisse l’impression d’un joyeux fatras où l’esprit peut s’ébattre sans entraves, mais jamais sans arrière-pensées. Dans sa brève préface qu’on aurait envie de retranscrire en entier, l’auteur nous en avait avertis : « … les mots se parlent entre eux, …. l’écrin du silence, … sa part rebelle ». On côtoie en effet des fulgurances poétiques : « j’aurais reconnu son silence entre mille », « seul un grain de folie peut boucher le sablier », des phrases parfois plus proches du jeu de mots « j’ai pris les mesures du possible : 7, 13 et 3 », « dans un monde si terne, trinquons ! », des pensées sur la condition humaine « la petite flamme qui brûle au fond de nous a un appétit énorme », et aussi des réflexions bien cinglantes « quand un macho est nu, on le croirait en uniforme, me confiait-elle », « il y a des paroles qui ont une haleine épouvantable ». Tout ceci est bien loin d’épuiser la variété de la floraison, qu’il serait stérile de vouloir catégoriser, sauf à retrouver partout une profonde humanité.
Mais c’est dans la lecture vagabonde que le plaisir s’invite le plus volontiers. Le livre accepte de bonne grâce qu’on l’ouvre au hasard. Tel aphorisme nous révèle alors parfois le sel, voire les épices, qui nous étaient restés cachés lors d’un premier passage.
Nul doute que le jour où la deuxième édition de l’anthologie de Michel Delhalle « Belgique, terre d’aphorismes – Anthologie subjective » verra le jour chez le même éditeur, Patrick Henin y figurera en bonne et due place.
André Leleux