Ralph Vendôme Dans quel monde on vit nouvelles éditions MEO (130 pages, 2024, 16 euros)

Les nouvelles peuvent appréhender tous les sujets pourvu qu’elles soient convaincantes comme avec « Riri, Fifi et loulou » où une mère répond à une question essentielle relative à la maternité :
« – Alors tu ne nous aimes pas, a murmuré Loulou
– Rien à voir, vous êtes là, je vous chéris et je vous aime. A une question sensée je fais une réponse sincère. Je vous fais confiance pour comprendre ce que je dis et pas pour fantasmer sur ce que je ne dis pas ».
Dans ces nouvelles c’est bien souvent le hasard ou le destin qui sont en cause ; un peu comme dans la vraie vie si ce n’est que surgit l’imprévu ou l’improbable projetant l’imagination dans des existences hypothétiques.
Comme dans son titre sans point d’interrogation on peut soit se demander « dans quel monde on vit » ou, au conditionnel du destin, dans quel monde on vivrait tandis qu’à travers, par exemple, le personnage d’un enfant, on peut sans doute deviner, pour l’auteur, les prémices d’attirance pour l’écriture et le « monde intérieur » : « Le monde intérieur. Quand je lis un livre, le voyage commence. Mes yeux se fixent sur un mot et voilà qu’il se dédouble, se multiplie, rassemble autour de lui des phrases entières qui s’envolent dans l’espace, franchissent la haie mitoyenne et se dirigent vers la fenêtre de la chambre de Fiona où ils pénètrent et se posent au pied de son lit. Alors s’élance une autre histoire, issue du mot d’origine, à la découverte du brûlant monde intérieur » (Dans la haie).
Avec cet ensemble de nouvelles, Ralph ne sort-il pas aussi « de la haie » pour pénétrer le jardin des autres, l’auteur nous disant, dans un de ses scénarios, que la vie est « ainsi faite qu’elle emprunte d’étranges voies » ?.
L’approche de la société et du monde des affaires n’est pas en reste avec « un ange est passé », l’auteur dénonçant le profit dans un contexte où les génies idéalistes deviennent des perdants.
On semble ainsi, pour chaque nouvelle, rester dans « la vraie vie » ce qui rend d’autant plus l’intrigue faussement réelle tandis que la résultante finale appelée parfois « chute » pour le genre littéraire, a tout de la réalité.
L’humour est parfois au rendez-vous quand Ralph nous dit que « s’emmerder seul ou à deux, ce n’est pas pareil » évoquant ainsi, avec « la vie d’avant » la solitude, l’indifférence dans le couple et le Covid, chaque nouvelle traduisant ainsi, en touches délicates, la société et ses petits travers.

On se délecte.
Les nouvelles au ton journalistique sont parfois proches du fait divers dont on aurait manipulé, in fine, l’intrigue.

Patrick Devaux